Alinéa
ALLÉGORIE
ALLITÉRATION
ANALOGIE
ANAPHORE
ASSONANCE
ASYNDÈTE
CÉSURE
CHANSON
CHUTE
Clausule
Comparaison
Déictiques
Démonstratifs
ELLIPSE
Facule discursive
JEU DE MOTS
HYPALLAGE
HYPERBOLE
HYPOTYPOSE
INCIDENTE
Métaphore
MÉTONYMIE
OXYMORE
PARAGRAPHE
PARALLÉLISME
Parataxe
PARODIE
Pastiche
POÈME EN PROSE
Pointe
Polysyndète
PRÉPOSITION
RIME
RIME CONSONANTIQUE
RYTHME (PROSE)
SONNET
STYLE ORAL
SYNECDOQUE
SYNESTHÉSIE
TIRET
VERS
VERS LIBRE
Verset
ZEUGMA |
INCIDENTE :
Une incidente est, dans sa définition traditionnelle, une proposition
incluse dans une phrase, pour y glisser une notation accessoire.
"TOUTES
LES RESSOURCES DE L'INCIDENTE"
L'un des traits les plus personnels de
l'écriture de Rimbaud réside dans l'art qu'il met à utiliser
"toutes les ressources de l'incidente" (l'expression est de
Paul Claudel, Oeuvres en prose, Pléiade, p.518). L'ampleur que Rimbaud confère parfois à ses
"incidentes", les effets qu'il en tire, élèvent ce trait de
syntaxe au niveau d'un procédé de style et déborde de très loin la
définition donnée ci-dessus.
Albert Henry, dans ses Contributions
à la lecture de Rimbaud (Académie royale de Belgique, 1998,
pages 282-299)
a consacré une étude particulière à ce qu'il préfère appeler
"l'insertion discursive" dans l'œuvre de Rimbaud. Il montre
comment le poète exploite ce procédé afin de mettre en évidence
certains segments de discours, grâce à l'effet de surprise produit sur
le lecteur par l'apparition d'un élément étranger à la structure
logique de la phrase. "Utilisée avec à-propos, l'insertion
discursive met mouvement et vie sur la ligne du discours" (op. cit.
p.288).
Enfin, détaillant les différentes variantes
de cette technique, il met en valeur celle qui lui
semble être la plus originale et qu'il nomme "facule
discursive" : une incidente développée jusqu'à occuper la
totalité d'une strophe ou d'un paragraphe de prose.
Albert Henry illustre son propos d'un grand nombre d'exemples
classés en fonction du niveau syntaxique où l'inclusion se produit.
C'est son article que nous résumons ici. L'insertion discursive peut se
glisser :
-
À
l'intérieur d'un groupe nominal :
[...] la soie, en foule et de lys pur, des oriflammes (Mémoire)
L'insertion occupe la place que pourrait avoir un groupe en
apposition mais sa nature grammaticale insolite déjoue l'attente du
lecteur et constitue donc bien une forme d'incidente. Le procédé
met en valeur les éléments de description contenus dans l'incise.
-
Entre
deux groupes de mots (entre deux syntagmes) :
À sa vision esclave, —
l'Allemagne s'échafaude vers des lunes; les déserts tartares
s'éclairent — les révoltes anciennes grouillent. (Soir
historique)
Le groupe de tête est le complément du verbe final, la
construction serait logique s'il n'y avait ces deux phrases
indépendantes, encadrées de tirets (exemples de ce que
"voit" le narrateur?), qui suspendent momentanément la
progression du raisonnement.
-
Entre
deux propositions :
Un couple de jeunesse s'isole sur l'arche, —
Est-ce ancienne sauvagerie qu'on pardonne ? — Et chante et se
poste. (Mouvement)
Un commentaire du narrateur s'inscrit entre deux propositions
indépendantes coordonnées. L'incidente sert à mettre en valeur un
mouvement affectif du narrateur.
-
Entre
deux phrases :
La main à plume vaut bien la main à charrue. —
Quel siècle à mains ! — Je n'aurai jamais ma main. (Une
saison en enfer)
Un commentaire du narrateur s'introduit entre deux phrases à
ponctuation forte (point) mais que leur sens voudrait consécutives.
Même valeur expressive que dans le cas précédent.
-
Entre
deux unités de composition du texte (paragraphes ou strophes) :
HONTE
Tant que la lame n'aura
Pas coupé cette cervelle,
Ce paquet blanc, vert et gras,
À vapeur jamais nouvelle,
(Ah ! Lui, devrait couper son
Nez, sa lèvre, ses oreilles,
Son ventre ! et faire abandon
De ses jambes ! ô merveille !)
Mais, non ; vrai, je crois que tant
Que pour sa tête la lame,
[...] |
Un quatrain tout entier est occupé par une incidente entre
parenthèses, qui sépare deux propositions subordonnées parallèles
introduites par "tant que ..." . La présence de nombreux
points d'exclamation, d'interjections, montre la forte affectivité du
passage (expression de la colère?) et contribue à l'opposer à son
contexte.
C'est ce dernier type d'incidentes qu'Albert Henry désigne par
l'expression "facule discursive". Il signale comme autres
exemples le 2° alinéa d'Angoisse
et l'avant-dernier alinéa d'Après
le Déluge, que vous pouvez consulter sur ce site. Ce sont deux
passages d'une grande intensité lyrique, où le poète laisse libre
cours à ses sentiments. "La facule discursive, commente Albert
Henry, traduit toujours, en effet, un mouvement psychologique
inattendu de ce contemplateur (le poète) en pleine
contemplation"
Le mot "facule" est un terme
d'astronomie, qui désigne "des plages brillantes qui se
détachent en clair sur la photosphère". Le critique l'emploie,
par métaphore, pour évoquer ces îlots sémantiques qui se
détachent parfois à la surface des textes de Rimbaud.
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