A.R., le poète > Anthologie > Jeunesse I-II-III-IV > Jeunesse I Dimanche > Panorama critique |
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JEUNESSE I. "DIMANCHE" Panorama critique
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Structure
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BERNARD : "Ce premier
texte nous montre le poète au travail, plus exactement décrit une
halte dans le travail, halte consacrée à la visite des souvenirs et
à la séance des rythmes. Les visions évoquées ici sont-elles d'ordre
hallucinatoire, sont-elles des transpositions de souvenirs ?"
(p.524). PY : "dans Dimanche, Rimbaud semble interrompre un travail de caractère scientifique (les calculs mis de côté) pour se livrer à l'invasion d'une rêverie présentée en termes qui la dévalorisent : inévitable, la séance" (Albert PY, Illuminations, Droz-Minard, 1969, p.189-196). GUYAUX (1985) : "La fin et le début du texte encadrent les visions parallèles qu'échafaude le paragraphe central" (p.107). STEINMETZ : "Le deuxième paragraphe représente de façon plus ou moins réaliste [...] le monde d'ennui du dimanche. Un tel ensemble mériterait d'être rapproché du poème Mémoire dont il semble une « version »" (p.171). HENRY : "On peut donc admettre, au départ, au moins à titre d'hypothèse de travail, que le verset 2 [comme montré précédemment à propos de paragraphes encadrés par des tirets dans Fairy, Angoisse et Honte] s'oppose, d'une façon qui serait alors à préciser, aux deux autres [...] le verset 2 évoque des spectacles du monde extérieur, ou des visions projetées dans ce monde, tandis que les versets 1 et 3 sont orientés vers le monde de l'esprit [...]. La rupture de conscience et l'hétérogénéité des états successifs sont soulignées par l'isolement de ce second verset" (p.182). BRUNEL (2004) : "le deuxième alinéa a pour charge de décrire
l'occupation de « la demeure, la tête et le monde de l'esprit » par
des images. [...] Cet alinéa entre tirets a la même fonction que le
deuxième alinéa d'Angoisse qui, lui, est mis entre parenthèses. Il
est occupé lui aussi, non par des aspirations intimes et des forces
internes, mais par une giclée d'images, tributaires peut-être de
souvenirs et de rythmes, en particulier de rythmes ternaires. Et ces
images sont plus déceptives que jamais, comme a pu être une voyance
en laquelle Rimbaud un moment a cru [...]"
(p.576). |
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Notes §1 |
♦ Les calculs de côté
BERNARD : "l'étude" ; "le travail
créateur actif et conscient". "Comprenons : les calculs étant
mis de côté (pour céder la place aux visions)" (p.524).
MURAT : "Le dimanche, chômé par obligation religieuse (« Les calculs
de côté »), fait une parenthèse dans le travail temps vide que
meuble « l'inévitable descente du ciel » et que hantent des images
de déréliction. Lorsque la parenthèse se ferme (« reprenons
l'étude ») une corrélation se dessine entre le premier et le dernier
paragraphe." (p.307). ♦ l'inévitable descente du ciel BERNARD : "la passivité du visionnaire"
(ibid.). LAWLER : "Descente du ciel" is the traditional image of the seer
who goes down from his height, the dreamer from his vision, the poet
from his empyrean" (James Lawler, The Poet as Self-Critic :
Rimbaud's "Jeunesse", The French Review, octobre 1988,
p. 11-24). MURPHY : "Le mouvement des bords coupés [du manuscrit de Génie] coïncide approximativement [avec le manuscrit de Jeunesse I], ainsi que les traits de séparation en haut et à gauche du manuscrit de Jeunesse, en bas et à droite pour Génie. Ce fait est intéressant dans le cadre de la paranarrativité du recueil. Il suffit en effet de noter la ndifférence, en fin de recueil, entre ces deux agencements de formulations figurant dans ces deux poèmes :
On sait que, pour Les Illuminations comme pour Une saison en enfer, la critique s'est efforcée d'évaluer la victoire ou l'échec, la force ou la faiblesse du poète, projet qui suppose souvent que l'on interprète des formules en fonction de leur emplacement relatif. Ici, le premier ordre, celui fourni par la plupart des éditions, est décidément optimiste, Génie niant le fatalisme de l'énoncé de Jeunesse I, tandis que le second contrecarre et répudie l'utopisme de Génie ... Or, c'est le second ordre, pessimiste, qui figurait dans le manuscrit, avant qu'il ne soit coupé en deux morceaux." (Steve Murphy, "Trois manuscrits autographes de Rimbaud", Histoires littéraires, n° 17, janvier-février-mars 2004, p.50-51).
GUYAUX (1985) : "les obsessions" ("La douleur physique, la pluie ou le crépuscule, la mémoire, les obsessions, compensent, bon gré mal gré, un désœuvrement digne d'une fin de semaine." p.106). STEINMETZ : "le narrateur songe [...] peut-être au poème" (ibid.) BISHOP : "De quoi s'agit-il au juste ce dimanche-là ? «Its sense is veiled », affirme James Lawler, qui comprend qu'il y a là une allusion à « la mécanique érotique » de H et qui soutient la thèse que tout tourne autour d'une « customary habit which contrasts with artistic construction » [...]. Si l'on accepte l'idée d'une opposition psychologique et conceptuelle entre la dernière phrase de Dimanche — « Reprenons l'étude [...] » — et tout ce qui précède, cette « séance des rythmes » peut être comprise comme faisant partie des activités et stratagèmes existentiels et poétiques, ou vieillis, ou banalisés par l'habitude, stratagèmes qui stabilisent au lieu de dynamiser, « occupent », préoccupent, obsèdent malgré la conscience, toujours intervallique mais aujourd'hui intensifiée, quasi « extatique » (je reprends le terme d'Edward Ahhearn), de certaines façons de « calculer », d'étudier en cédant à des « impatiences » poético-ontologiques enfin assumées. La notion de « séances » semble ainsi privilégier une délibération, un effort structuré mais trop alourdissant, débat et travail qui pèse, replié ici sur la logique d'une métrique, d'une « musique », celle de la poésie ou des sphères [...]'. (p.27). BRUNEL (2004) : "Ce dimanche [...] sera occupé par une visitation qui n'a plus rien de religieux : celle des souvenirs, celle, moins banale, des rythmes. L'âme est laissée de côté au profit de l'esprit". (p.576)
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§2 |
♦ Un cheval détale GUYAUX (1985) : "c'est un
événement qui peut être plus immédiat, plus proche du présent actuel
et du réel que les événements qui, dans la suite, ont la saveur du
phantasme et du mélodrame" (p.106). ♦ le turf suburbain UNDERWOOD : "Pour Littré en 1873, le turf est un
genre de sport mais le turf suburbain de Rimbaud a le sens primitif
de gazon" (V.P. Underwood, Rimbaud et l'Angleterre, p.294). ♦ boisements STEINMETZ : "Échafaudages"
(ibid.) ♦ percé par la peste carbonique BERNARD : "Il est possible que l'expression
peste carbonique fasse allusion à cette « fumée de charbon »
dont Rimbaud parle dans Ville" (p.524). ♦ une misérable femme de drame BERNARD : "pourrait être Mathilde Verlaine"
(p.324). ♦ après ("après des abandons improbables", "après l'orage, l'ivresse et les blesssures") STEINMETZ : "Le sens de ces deux expressions est
le même. La femme souhaite une rencontre. Les desperadoes attendent
que des événements dissipent leur ennui" (ibid.) ♦ desperadoes UNDERWOOD : "mot anglais, venu du vieil espagnol,
employé surtout par les journalistes et les auteurs de romans
policiers" (p.294-295). ♦ étouffent des malédictions HENRY : "formulation métonymique de languir après [...] l'ennui dominical est travaillé en profondeur par la révolte contenue" (p.185).
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§3 |
♦ l'étude BRUNEL (2004)
: "Cette étude-là vise une composition (« l'œuvre [...] qui se
rassemble », donc qui se constitue [...], une hauteur, une sublimité
peut-être (c'est ce que pourrait suggérer « remonte dans les
masses », le contraire en tout cas de « vulgaire »). Cette dernière
phrase [...] réaffirme et consolide avec une énergie renouvelée
après un temps de latence le projet qui est sans nul doute le projet
des Illuminations." (p.577). ♦ au bruit HENRY : "bruit doit être rattaché au champ verbal
si important chez Rimbaud, actualisé par rythme, musique,
harmonie... ; bruit évoque ici, en particulier, le fourmillement plus
ou moins harmonique du travail" (p.185-186). Cf. "Départ dans
l'affection et le bruit neufs". ♦ œuvre dévorante HENRY : "exprime bien le but exigeant, exclusif et
suprême" (p.185). HENRY : "dispersée et comme recouverte par les intrusions accumulées dans le verset 2, l'œuvre en devenir joint ses membres épars et, reprise par l'attention très « calculante », elle remonte à la surface, comme une bulle d'Archimède irrésistiblement ascendante, à travers les masses"." (p.186). MURPHY : "évocation topique du rassemblement des foules, de la remontée insurrectionnelle du déluge populaire [...], bref d'une entreprise de démolition qui met en parallèle l'étude du sujet locuteur (cf. « l'optimisme studieux ») et l'œuvre des « masses ». Les eaux et les tristesses commencent-elles à monter et à relever les Déluges ? C'est en tout cas sur un ton passablement gnomique que le locuteur livre les fruits messianiques de son « étude » aux « masses » invoquées." (p.500).
HENRY : "les foules dominicales" ou, mieux, "ce lourd fardeau d'éléments extérieurs ou projetés [évoqués dans le §2] qui auraient pu étouffer l'œuvre impatiente" (p.186).
On pourra trouver ci-après un Bilan de lecture
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