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Exercice de dissertation

 

 
 

Sujet (objet d'étude : lire, écrire, publier).

     Dans un entretien avec un journaliste, le romancier contemporain J.M.G Le Clézio déclare : "Écrire est un besoin" et il définit l'écrivain comme quelqu'un qui cherche avant tout à combler un sentiment de manque : "Un écrivain est sans doute quelqu'un d'imparfait, qui n'est pas terminé, et qui écrit, justement, en vue de cette terminaison, qui recherche inlassablement cette perfection".
     En vous appuyant sur votre culture générale et sur vos lectures de l'année, vous vous interrogerez sur la justesse de ce point de vue.

 

ANALYSE DU SUJET


Problématique

Le sujet demande de discuter une définition de la vocation littéraire ; il pose la question : pourquoi écrit-on ? La réponse de JMG Le Clézio représente une conception exigeante de la littérature, où l'acte d'écrire est dicté par une forte motivation intérieure (un "besoin") et un désir d'absolu (de "perfection"). Rimbaud semble pouvoir illustrer doublement une telle définition, étant plus que tout autre celui qui fixa à la littérature la mission de "changer la vie", de réinventer l'amour, etc. mais aussi celui qui ne se crut pas tenu de continuer à écrire lorsque l'injonction vitale eut perdu son emprise, et qui eut le courage de dire : "je ne m'occupe plus de ça !" Où l'on voit que la formule : "Écrire est un besoin" a logiquement pour corollaire cette autre formule : "Il n'est pas nécessaire d'écrire".

Mais l'activité littéraire ne renvoie pas seulement, ne renvoie pas toujours à des motivations aussi profondes. Écrire est aussi un "métier", une activité sociale. Celui qui s'y consacre cherche à trouver sa place dans la société en répondant à une demande. Tous ceux qui s'y essaient n'y parviennent pas (Rimbaud est, dans un sens, un bon exemple de cet échec). Il peut même arriver que certains écrivains, soucieux avant tout de reconnaissance sociale et de réussite matérielle, limitent leur ambition à devenir des professionnels du divertissement, et qu'ils abandonnent toute implication personnelle authentique pour se contenter de s'adapter au goût d'une époque, d'un public (d'un "lectorat"). 

Plan possible : Le devoir pourra donc se traiter en deux parties correspondant aux deux propositions d'un raisonnement concessif : 1) Certes l'activité littéraire apparaît, à travers ses représentants les plus exigeants, comme l'assouvissement d'un besoin intérieur; 2) mais la littérature est aussi, tout simplement, un métier. Dans une troisième partie (ou au moins dans la conclusion, si l'on ne souhaite pas développer l'idée à fond), il faudra toutefois signaler que ces deux aspects de l'activité littéraire ne sont pas nécessairement inconciliables.

 

EXERCICE

Rédigez deux paragraphes s'appuyant sur l'exemple d'Arthur Rimbaud destinés à prendre place dans le plan ci-dessus, l'un dans la première partie, l'autre dans la seconde.

 

DOCUMENT

Voici à titre de document un extrait plus substantiel de l'entretien mentionné par le sujet, emprunté au manuel Nathan, Seconde, publié sous la direction de Dominique Rincé : 

     « Il est très difficile de parler de ce qu'on écrit, parce qu'on écrit d'abord pour une raison qu'on ne comprend pas. Si on la comprenait, peut-être arrêterait-on d'écrire... Écrire est un besoin... C'est à l'intérieur de vous-même, ça a besoin de sortir, et de sortir sous cette forme. Si vous modifiez la structure de ce que vous faites, il me semble qu'alors vous n'aurez plus envie de continuer. Écrire n'est pas facile. Écrire est un art, qui demande beaucoup d'entraînement; je veux dire, qui exige davantage que de connaître le dictionnaire de la langue française et la syntaxe de cette langue. Il faut avoir lu des auteurs, les avoir digérés, avoir éprouvé le besoin de faire mieux qu'eux.
     (...) J'ai l'impression, parfois, d'avoir écrit énormément. je me souviens d'un jour où je parlais avec Michel Butor et il me disait : « On écrit trop. » Alors, je pensais : « Est-ce que c'est vrai ? » Et cela m'inquiétait. Je me disais : « je devrais brûler tout ce que j'ai écrit. Ce ne sont là que choses inutiles. Un bon autodafé, rien de tel ! » Mais, réflexion faite, cela me donnait immédiatement un argument irréfutable : puisque tout ce que j'ai fait est inutile, il faut que je continue ; peut-être trouverai-je enfin quelque chose d'utile... J’en concluais qu'un écrivain est sans doute quelqu'un d'imparfait, qui n'est pas terminé, et qui écrit, justement, en vue de cette terminaison qui recherche inlassablement cette perfection. » 

            Interview de J.M.G. Le Clézio par Gérard de Cortanze, Magazine littéraire, n° 262, février 1998.