Arthur Rimbaud, le
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Chant de guerre Parisien (1871)
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Présenté comme un "psaume d'actualité", ce poème a été envoyé à Paul Demeny dans la célèbre lettre dite du voyant. Daté de Charleville, 15 mai 1871, ce courrier précédait d'une semaine à peine l'entrée dans Paris des troupes versaillaises et l'écrasement de la Commune. Rimbaud y dit à son correspondant : "dans huit jours je serai à Paris, peut-être". Rimbaud n'ira pas à Paris. Mais, par l'imagination, il y est déjà. Chant de guerre parisien versifie en style de chanson, et met en scène sur un mode burlesque, le face à face entre les deux protagonistes de la bataille de Paris : "ils", "vous" (les autres, les Versaillais) / "nous" (les Parisiens, les "Communards", ceux qui parlent dans le poème). Et, parmi ces derniers, n'en doutons pas, celui qui crie à Thiers et consorts :
Secouer "les Ruraux", mais comment ? Dans l'attente de pouvoir les déranger vraiment dans leurs "longs accroupissements" (défécateurs), en employant déjà l'arme des mots, de l'irrespect et de l'ironie. Or, s'il s'agit de rire de ces comiques, les munitions ne manquent pas : elles emplissent ces publications satiriques qui prolifèrent avec l'agonie de l'Empire, littéraires ou graphiques, signées Vallès ou Vermersch, Faustin, Le Petit ou Corseaux, ayant pour titres Le Cri du peuple et Le Père Duchêne, Le Hanneton, Le Grelot ou La Charge. Sur leur modèle, Rimbaud peint les bourreaux en petits Amours culs-nus ; Favre, en traître de comédie, pour avoir vendu la République à Bismarck, et en hypocrite pleurard ; enfin, les armées de Versailles en soldats d'opérette, ou en hannetons vibrionnants qui larguent sur la "Grand ville" au "pavé chaud" des "choses printanières". Mais railler ne suffit pas. Aussi faut-il voir simultanément dans le poème ce que son titre appelle un "chant de guerre", propre à galvaniser la combativité des Communards et à renforcer leur foi dans la victoire. Le Printemps est évident, argumente le poète, car, depuis que Thiers et Picard lancent leurs volées d'obus du cœur des Propriétés vertes qu'ils ont volées ("le vol de Thiers et de Picard"), celles-ci tiennent grandes ouvertes les splendeurs qu'elles recèlent. Ces "splendeurs", jusqu'ici interdites au peuple de Paris, voilà que les Ruraux, en établissant leurs quartiers au sein des banlieues résidentielles de l'Ouest parisien pour le bombarder, lui en indiquent et lui en ouvrent le chemin : il suffit aux Communards, pour s'en saisir, de les aller déloger. Et "les Ruraux", alors ...
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