Arthur Rimbaud, le poète / Accueil > Iconographie > Photos > Rimbaud par Carjat (le plus célèbre des deux clichés)

 


 

Musée Rimbaud de Charleville-Mézières

Étienne Carjat photographiait M. Arthur Rimbaud en octobre 1871 [...]. N'est-ce pas bien "l'Enfant Sublime" sans le terrible démenti de Chateaubriand, mais non sans la protestation de lèvres dès longtemps sensuelles et d'une paire d'yeux perdus dans du souvenir très ancien plutôt que dans un rêve même précoce ? Un Casanova gosse mais bien plus expert ès aventures ne rit-il pas dans ces narines hardies, et ce beau menton accidenté ne s'en vient-il pas dire : "va te faire lanlaire" à toute illusion qui ne doive l'existence à la plus irrévocable volonté ? Enfin, à notre sens, la superbe tignasse ne put être ainsi mise à mal que par de savants oreillers d'ailleurs foulés du coude d'un pur caprice sultanesque. Et ce dédain tout viril d'une toilette inutile à cette beauté du diable !

Paul Verlaine     

 

     Extrait d'un court texte de Verlaine, paru dans Lutèce du samedi 29 mars au samedi 5 avril 1884. L'article était destiné à faire quelque publicité aux Poètes maudits, qui venaient de paraître. Verlaine commente l'effigie de Rimbaud par Blanchet illustrant cet ouvrage. Il la présente comme une reproduction fidèle de la photographie de Carjat, que sa description évoque irrésistiblement. On comprendra mieux l'allusion verlainienne à la "tignasse" en se reportant au médaillon exécuté par Luque pour la réédition de 1888, qui imite le dessin de Blanchet (texte reproduit par Jean-Jacques Lefrère dans sa Correspondance de Rimbaud, Fayard, 2007, p.382).

   L'original de ce portrait photographique de Rimbaud par Carjat a été perdu (ou, en tout cas, perdu de vue). Nous en connaissons seulement des reproductions datant du début du vingtième siècle.

 

 

 

La reproduction de la BNF (provenant de Paul Claudel)
 

Source : http://chezleslibrairesassocies-rimbaud.blogspot.fr/2016/03/le-rimbaud-de-carjat-entre-la-bnf.html


   Cette reproduction, réalisée "vers 1912", n'a été retrouvée qu'en 2014, parmi les archives de Paul Claudel. Elle a été révélée par Jacques Desse dans
Histoires littéraires n°57. Elle a été acquise depuis par la BNF. Cette reproduction a l'intérêt de montrer (en bas de l'image) une partie du carton Carjat sur lequel l'original était monté, ce qui semble prouver qu'elle a été produite directement à partir de cet original :


ETIENNE CARJAT & Cie PHOT.                  10, RUE NTRE DE DE LORETTE

Elle respecte d'ailleurs les dimensions habituelles d'un portrait-carte (10 cm de hauteur) alors que la reproduction du Musée de Charleville constitue un agrandissement (18 cm). Selon Jacques Desse, ce contretype des années 1910 est la plus ancienne et plus authentique copie du célèbre portrait, dont l'original (rappelons-le) a été perdu.


Les reproductions du Musée Rimbaud

   Le Musée Rimbaud de Charleville détient de ce même portrait, depuis 1995, une épreuve de couleur sépia. On ignore quand ce document a été réalisé, probablement au début du XXe siècle. "Il s'agit d'un contretype de la photographie de Carjat" (c'est-à-dire d'une photographie du positif), explique le conservateur du Musée Rimbaud, Alain Tourneux. Ce dernier précise encore, dans l'article qu'il a publié à propos de cette photographie sur le blog de Jaques Bienvenu, que ce document a fait l'objet d'un don au Musée de la part de Raymond Gid. Il aurait été préalablement détenu par Jean Cocteau qui l'aurait "emprunté" à la NRF et jamais rendu, au grand désagrément d'André Gide.
    
Jacques Desse offre sur le blog des Libraires associés la copie de ce contretype "actuellement diffusée par le Musée Rimbaud" et qui "n'a quasiment jamais été publiée (sauf dans Face à Rimbaud, 2006)". Il la considère comme "LA SEULE REPRODUCTION FIABLE", c'est-à-dire non retouchée (sur le beau cliché en blanc et noir que je reproduis en haut de page, par exemple, Rimbaud a l'oreille gauche remodelée et les yeux soulignés d'un trait noir).
 

Source : http://chezleslibrairesassocies-rimbaud.blogspot.fr/2013/08/reproductions-de-reference-1-cliches-du.html
 

     Un autre agrandissement, en noir et blanc, datant du début du siècle (il est authentifié au verso de la main d'Isabelle Rimbaud, qui est décédée en 1917), cliché  ayant appartenu à André Gide, figure aujourd'hui dans les collections du musée. On trouvera la description et l'histoire de cette pièce, don de la Fondation Catherine Gide, dans le blog de Jacques Bienvenu, aux dates du :

28 juin 2012
http://rimbaudivre.blogspot.fr/2012/06/don-de-la-fondation-catherine-gide-au.html
28 juillet 2012
http://rimbaudivre.blogspot.fr/2012_07_01_archive.html
28 octobre 2015
http://rimbaudivre.blogspot.fr/2015/10/video-et-compte-rendu-de-la-conference.html
 

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    Il semble que Berrichon et Claudel aient fait tirer de ce portrait de Rimbaud par Carjat plusieurs exemplaires qu'ils ont généreusement distribués à des amis. Selon Jacques Desse, qui a analysé les portraits de Rimbaud par Carjat sur le site Culture visuelle, la BNF possède par exemple une épreuve en noir et blanc collée par Claudel dans son journal. Jacques Desse reproduit cette image :

 

 

   L'existence de ce portrait a été révélée par Paterne Berrichon en 1922, dans son édition des œuvres de Rimbaud aux Éditions de La Banderole. Jacques Bienvenu reproduit dans son blog Rimbaud ivre l'image alors rendue publique par le beau-frère du poète :