Vingt ans
Les voix instructives exilées... L'ingénuité physique amèrement
rassise.... — Adagio — Ah ! l'égoïsme infini de l'adolescence,
l'optimisme studieux : que le monde était plein de fleurs cet été !
Les airs et les formes mourant.... — Un chœur, pour calmer
l'impuissance et l'absence ! Un chœur de verres, de mélodies
nocturnes.... En effet les nerfs vont vite chasser.
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« Vingt ans »
présente le schéma temporel ternaire, habituel aux poèmes de bilan des Illuminations, celui,
notamment des autres sections de la série Jeunesse.
Un
passé au bilan mitigé : d'une part, le poète regrette l'optimisme de
ces années d'apprentissage, les maîtres qu'il s'était donnés en
poésie et en politique, qui se sont éloignés de lui ; d'autre part,
il réprouve l'égoïsme de son adolescence et exprime une lassitude de
ce que « Sonnet » appelle « la Chair ».
Un présent morose :
une impression d'extrême lenteur (« adagio »), de stérilité en tant
que poète (« formes » et « airs » confondus), l'imminence d'un
effondrement nerveux.
Un avenir, enfin,
tablant sur l'œuvre future et la fraternité humaine : les mots
« chœur », « chœur de verres » (désignation imagée du Glassharmonica)
sont à relier d'un côté aux « foules » de Jeunesse
IV et aux « masses » de Jeunesse I (« Au bruit de
l'œuvre dévorante qui se rassemble et remonte dans les masses ») ; de l'autre,
au thème de la « voix » et de la
« danse » dans Jeunesse II. Toute idée de salut
personnel et/ou collectif mobilise chez Rimbaud une correspondance
sonore : une référence au bruit (Départ),
au chant (Villes [II]), à la musique (Guerre), à « l'éveil fraternel de toutes
les énergies chorales et orchestrales » (Solde), à « toutes les possibilités
harmoniques » (Jeunesse IV).
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