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ALCHIMIE DU VERBE

 

SOMMAIRE DU DOSSIER


Alchimie du verbe / Texte et commentaire

Des poèmes d'Alchimie du verbe / Les inflexions sémantiques imprimées par Rimbaud à ses poèmes de 1872

Des poèmes d'Alchimie du verbe / Bibliographie commentée (1920-2020)

La "fatalité de bonheur" : une parodie du discours chrétien sur le salut / Lecture (partielle) de la dernière partie d'Alchimie du verbe

 


Dans sa lettre à Ernest Delahaye dite de Laïtou, Rimbaud définit l'œuvre à laquelle il s'attelle en ces mois d'avril-mai 1873 comme une série d'"histoires atroces", "à inventer" (et non une autobiographie). On retrouve ce terme d'"histoire" au début du chapitre Alchimie du verbe : "À moi. L'histoire d'une de mes folies". Dans cette même lettre, Rimbaud demande à son copain de lui procurer le Faust de Goethe. Il a sans doute vu dans le mythe du satanique docteur, et dans mille histoires pareilles de grands génies détruits par la démesure de leur ambition, mises en circulation par le romantisme, un modèle intéressant à transposer pour évoquer sa trajectoire imprudente et superbe. Mais on doute qu'il en ait vécu les périls avec l'intensité dramatique qu'il introduit, entre deux ironies, dans la très véridique relation de sa crise maniaque. Sous le Rimbaud tragediante d'Alchimie du verbe se cache un Rimbaud ludens.

L'idée de "jeu" choquera peut-être ceux qui prennent très au sérieux l'expérience poétique autodestructrice dont le cinquième chapitre d'Une saison en enfer (désormais USEE) offre la pittoresque reconstitution. Pourtant, c'est bien par une forme de jeu que Rimbaud se projette dans ce personnage de "voyant", qu'une pratique assidue de l'hallucination, d'abord volontaire mais bientôt subie, obsessionnelle et morbide, manque de conduire jusqu'à son "dernier couac". Il s'accuse d'en avoir un peu trop exploité, dans ses chansons de 1872, le cliché romantique et la pose mystique mais le prétexte est bon pour en exploiter une fois de plus la ficelle, en enjolivant sous les atours mythologiques d'une nouvelle damnation de Faust la relation d'une crise existentielle et littéraire, réellement vécue celle-là, et douloureuse certes, et génératrice d'un désir que je crois sincère de tourner la page, mais de proportions somme toute plus modestement humaines.

Le dossier sur Alchimie du verbe que je propose ici se compose de plusieurs pages présentant respectivement :
 

  Un commentaire

Il en est d'Alchimie du verbe (désormais ADV) comme de la lettre à Demeny du 15 mai 1875, on commente souvent à part vers et prose, comme s'ils n'avaient que peu de rapport entre eux. Voulant en agir autrement et montrer que Rimbaud, moyennant quelques retouches, a réussi à insérer de façon harmonieuse ses poèmes au sein du texte prévu pour les enchâsser, j'ai confectionné ce commentaire linéaire "intégré" du chapitre, découpé en cinq parties correspondant aux cinq "intermezzos poétiques" (cinq parties pour sept poèmes, quatre de ces derniers étant associés par groupes de deux). L'ambition en est limitée. Je me suis en effet fixé comme règle de présenter la chose sous forme d'un tableau au sein duquel ma propre prose (colonne de gauche) ne dépasserait pas en longueur le texte du chapitre (colonne de droite). La contrainte a été à peu près respectée.
 

Une étude sur les modifications sémantiques apportées par Rimbaud à ses anciens poèmes insérés dans ADV

Aussi étonnant que cela puisse paraître, c'est là une question rarement abordée de façon précise. Les revues rimbaldiennes regorgent d'études sur les remaniements formels dont témoignent ces versions imprimées : rimes, mètre, composition. Essais et articles traitent abondamment du sens nouveau donné par Rimbaud à ses poèmes, débattent de la "continuité" ou non d'ADV avec les "Derniers vers", de la question de savoir si ADV constitue une autocritique par Rimbaud de sa production poétique de l'année 1872 ou s'il ne faudrait pas plutôt considérer ce chapitre d'USEE comme une anthologie, mais presque toujours de façon assez générale, à travers des exemples ciblés, et sans qu'on trouve jamais une analyse cas par cas des inflexions sémantiques significatives repérables dans les textes. J'ai tenté de traiter le sujet de manière plus systématique.
 

  Une bibliographie commentée (1920-2020), concernant les modifications sémantiques apportées par Rimbaud à ses anciens poèmes

Dans le cadre de l'étude précédemment citée, j'ai été amené à relire une grande partie de ce qui avait été écrit sur la question en un siècle de rimbaldisme :

  • une seule étude systématique (Bandelier, 1988),

  • quelques rares articles traitant directement la question mais sur un corpus de références limitées, un seul poème le plus souvent dans ses différentes versions (Fongaro, 2008 ; Rossi, 2010 ; Hamanaga, 2014),

  • les nombreuses considérations disséminées dans les lectures de poèmes de 1872 (Meyer, 1996, surtout), dans les notes des éditions critiques commentées, dans les articles portant sur tel ou tel thème en rapport avec le sujet (la "vieillerie poétique", l'hallucination, l'alchimie, les "sophismes de la folie", la métaphore de la soif, la "fatalité de bonheur", le sacré dans ADV, etc.), dans les chapitres des essais consacrés à USEE portant sur ADV ,

  • enfin, les articles ou chapitres alimentant le débat général sur la question posée (Guyaux, 1984 ; Murphy (2004, 2014) ; Murat (2009, 2015) ; Nakaji (2009, 2015).

J'ai fatalement été amené à déborder un peu le cadre annoncé et à rendre compte de travaux concernant les remaniements formels opérés par Rimbaud sur ses poèmes de 72, l'interprétation de tel ou tel poème d'ADV,  la composition d'ADV en tant que récit, l'interprétation d'ADV dans son sens général, etc.
 

Une tentative d'exégèse du discours sur la "fatalité de bonheur"

Au cours des lectures occasionnées par la préparation de ce dossier (autour du poème "O saisons, ô châteaux", notamment), un passage important d'ADV m'a paru mettre sérieusement en échec le commentaire rimbaldien : la fameuse phrase "Je vis que tous les êtres ont une fatalité de bonheur" et le développement "philosophique" qui l'accompagne (la vie et l'action, la vie et la morale, etc.). Rien de ce que je lisais ne correspondant avec ma lecture spontanée du texte, dans cet endroit pourtant stratégique du dénouement d'ADV, j'ai tenté de mettre au clair ma propre lecture.

 

     
   

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