VERSIONS ALTERNATIVES DU SONNET DU TROU DU CUL ET AUTRES "IMMONDES" (STUPRA)
"Les
immondes". C'est le nom que Verlaine donne aux "trois sonnets
obscènes" qu'il
s'efforce de reconstituer avec l'aide de Delahaye en 1883. Il semble que Verlaine et Delahaye aient perdu toute trace du
Sonnet du trou du cul et des deux autres poèmes (
"Nos fesses ne sont pas les leurs...", "Les anciens animaux ...")
lorsque, en 1883, Delahaye propose à Verlaine de les reconstituer pour lui. Nous sont parvenus de cet épisode la lettre par laquelle
Delahaye s'acquitte de sa promesse (14 octobre 1883) et, quelque temps
plus tard, les trois lettres par lesquelles Verlaine fait profiter
Charles Morice de ces résurrections.
La tradition éditoriale présente ces textes sous le nom de "Stupra". "Stupra"
(stupres, obscénités) est le titre ("qui a toute les chances d'être
apocryphe", dit Breton dans Flagrant Délit) sous lequel la revue
surréaliste Littérature publia les trois sonnets dans son numéro de
février-mars 1923. La même année, et sous le
même titre, l'éditeur Messein fit paraître les mêmes œuvres en plaquette
sous le cryptonyme d' "Imprimerie particulière" et en indiquant la date
fictive de 1871.
Dans sa lettre à Charles Morice du 20 décembre
1883, Verlaine ajoute Vers pour les
lieux, deux quatrains autonomes placés sous un même titre qui auraient
été inscrits par Rimbaud en 1872 sur les murs des toilettes du café de
Cluny.
On peut ajouter dans cette rubrique "parazutique" la version
légèrement différente du Sonnet du trou du cul placée en
appendice du recueil Hombres (vendu par Verlaine à Vanier en 1892
mais seulement publié, à titre posthume, par Messein, en 1903). |







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Lettre de Delahaye à
Verlaine du 14 octobre 1883
"Nos fesses ne sont pas les leurs..."
"Obscur
et froncé.."
"Les anciens animaux ..."
Lettres de Verlaine à Charles Morice des 20, 25 et
30 12/1883
"Nos fesses ne sont pas les leurs..."
Le Trou du cul
"Les anciens animaux ..."
Vers pour les lieux
(1872)
Le Sonnet du trou du cul par Arthur Rimbaud et Paul Verlaine |
Lettre de Delahaye à Verlaine du 14 octobre 1883.
Localisation inconnue. Ce
texte est celui que donnaient J.Mouquet et A. Rolland de
Renéville en 1963 dans la première Pléiade Rimbaud (p.109).
Steve Murphy pense que les auteurs ont pu consulter la
reconstitution opérée par Demeny dans sa lettre du 14 octobre
1883 (corrigée par Verlaine), chez le libraire Matarasso.
Cf.SM-I p.607. |
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Nos fesses ne sont pas les leurs...
Nos fesses ne sont pas les leurs.
Souvent j'ai vu Des gens déboutonnés derrière quelque haie, Et, dans ces bains sans gêne où l'enfance s'égaie, J'observais le plan et l'effet de notre cul.
Plus ferme, blême en bien des cas, il est pourvu De méplats évidents que tapisse la claie Des poils ; pour elles, c'est seulement dans la raie Charmante que fleurit le long satin touffu.
Une ingéniosité touchante et merveilleuse Comme l'on ne voit qu'aux anges des saints tableaux Imite la joue où le sourire se creuse.
Oh ! de même être nus, chercher joie et repos, Le front tourné vers sa portion glorieuse, Et libres tous les deux murmurer des sanglots ?
Sommaire |
Lettre de Delahaye à Verlaine du 14 octobre 1883.
Localisation inconnue.
Même explication que ci-dessus, dans la note sur Nos fesses
ne sont pas les leurs.
Principales variantes par
rapport à l'Album zutique :
Titre absent
v.3 "la rampe douce" vs. "la fuite douce"
v.4 "jusqu'au bord de" vs."jusqu'au cœur de"
v.6 "sous l'autan cruel" vs. "sous le vent cruel"
v.13 "Le tube d'où descend" vs "C'est le tube où descend"
Autres versions que celles de
cette page :
Album zutique
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Obscur et froncé
comme un œillet violet, Il respire humblement tapi parmi la
mousse. Humide encor d'amour, qui suit la rampe douce Des
fesses blanches jusqu'au bord de son ourlet. Des
filaments pareils à des larmes de lait Ont pleuré sous l'autan cruel qui les repousse À travers de petits caillots de
marne rousse, Pour s'aller perdre où la pente les appelait.
Mon rêve s'aboucha souvent à sa ventouse ; Mon âme, du coït
matériel jalouse, En fit son larmier fauve et son nid de
sanglots. C'est l'olive pâmée et la flûte câline, Le
tube d'où descend la céleste praline, Chanaan féminin dans
les moiteurs enclos.
Sommaire |
Lettre de Delahaye à Verlaine du 14 octobre 1883.
Localisation inconnue.
Même explication que ci-dessus, dans la note sur Nos fesses
ne sont pas les leurs.
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Les anciens animaux...
Les anciens animaux saillissaient, même
en course, Avec des glands bardés de sang et d'excrément. Nos pères étalaient leur membre fièrement Par le pli de la gaine et le grain de la bourse.
Au moyen âge pour la femelle, ange ou pource, Il fallait un gaillard de solide grément : Même un Kléber, d'après la culotte qui ment Peut-être un peu, n'a pas dû manquer de ressource.
D'ailleurs l'homme au plus fier mammifère est égal ; L'énormité de leur membre à tort nous étonne ; Mais une heure stérile a sonné : le cheval
Et le bœuf ont bridé leurs ardeurs, et personne N'osera plus dresser son orgueil génital Dans les bosquets ou grouille une enfance bouffonne.
Sommaire
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Lettres de Verlaine à Charles Morice des 20, 25 et
30 12/1883 Localisation
actuelle inconnue.
Variantes, outre ponctuation :
Q (v.4)
innocuité (v.9)
O (v.12) Sa (v.13) |
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Nos fesses ne sont pas les leurs...
Nos fesses ne sont pas les leurs.
Souvent j'ai vu Des gens déboutonnés derrière quelque haie Et dans
ces bains sans gêne où l'enfance s'égaie J'observais le plan
et l'effet de notre Q.
Plus ferme, blême en bien des cas, il est pourvu De méplats évidents que tapisse la claie Des poils.
Pour elles, c'est seulement dans la raie Charmante que fleurit le long satin touffu.
Une innocuité touchante et merveilleuse Comme l'on ne voit qu'aux anges des saints tableaux Imite la joue où le sourire se creuse.
O de même être nus, chercher joie et repos Le front tourné vers
Sa portion glorieuse, Et libres tous les deux murmurer des sanglots
!
Sommaire |
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Lettre de Verlaine à Charles
Morice du 25 décembre 1883.
Localisation actuelle
inconnue.
Principales variantes par rapport
à l'Album zutique : Titre v.3 "la rampe douce" vs. "la fuite douce" v.4 "jusqu'au bord de" vs."jusqu'au cœur de" v.8 "s'en aller où" vs. "s'aller perdre où" v.13 "Le tube d'où descend" vs "C'est le tube où descend"
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Le Trou du cul
Obscur et froncé
comme un œillet violet, Il respire humblement tapi parmi la
mousse. Humide encor d'amour, qui suit la rampe douce Des
fesses blanches jusqu'au bord de son ourlet. Des
filaments pareils à des larmes de lait Ont pleuré sous le
vent cruel qui les repousse À travers de petits caillots de
marne rousse Pour s'en aller où la pente les appelait. Mon rêve s'aboucha souvent à sa ventouse. Mon âme, du coït
matériel jalouse, En fit son larmier fauve et son nid de
sanglots. C'est l'olive pâmée et la flûte câline, Le
tube d'où descend la céleste praline, Chanaan féminin dans
les moiteurs enclos !
Sommaire
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Lettres de Verlaine à Charles Morice des 20, 25 et
30 12/1883. Localisation
actuelle inconnue.
Variantes : ponctuation et
majuscules. |
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Les anciens
animaux...
Les anciens animaux saillissaient
même en course Avec des glands bardés de sang et d'excrément. Nos pères étalaient leur membre fièrement Par le pli de la gaine et le grain de la bourse.
Au Moyen Age, pour la femelle, ange ou pource, Il fallait un gaillard de solide gréement : Même un Kléber, d'après la culotte qui ment Peut-être un peu, n'a pas dû manquer de ressource.
D'ailleurs l'Homme au plus fier mammifère est égal
L'énormité de leur membre à tort nous étonne. Mais une heure stérile a sonné.
Le Cheval
Et le bœuf ont bridé leurs ardeurs, et personne N'osera plus dresser son orgueil génital Dans les bosquets ou grouille une enfance bouffonne.
Sommaire
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Lettres de Verlaine à Charles Morice des 20, 25 et
30 12/1883. Localisation
actuelle inconnue.
Il ressort de la
lettre que ces deux quatrains sont des pièces
autonomes, "Vers pour les lieux" étant moins un
titre qu'une indication en quelque sorte générique.
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De ce siège si mal
tourné Qu'il fait s'embrouiller nos entrailles, Le trou dut être maçonné Par de véritables canailles.
Quand le fameux
Tropmann détruisit Henri Kink Cet assassin avait dû s'asseoir sur ce siège Car le con de Badingue et le con d'Henri V Sont bien dignes vraiment de cet état de siège.
Sommaire
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Copie Verlaine Version imprimée dans
Hombres (1903)
On a tenté de donner un
équivalent dactylographique de la présentation du
manuscrit.
Principales variantes par
rapport à l'Album zutique : Titre v.6 "sous l'autan cruel" vs. "sous le vent cruel" v.8 "s'en aller où" vs. "s'aller perdre où" v.9 "s'accoupla" vs. "s'aboucha"
v.14 "éclos" vs "enclos"

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par
Paul Verlaine et Arthur Rimbaud
En
forme de parodie d'un volume d'Albert Mérat, intitulé l'Idole,
où sont détaillées toutes les beautés d'une dame :
"Sonnet du front, Sonnet des yeux, Sonnet des fesses,
sonnet du ... dernier sonnet .
Paul Verlaine fecit. P.V. |
{ |
Obscur et froncé
comme un œillet violet Il respire, humblement tapi parmi la mousse Humide encor d'amour qui suit la pente douce Des fesses blanches jusqu'au bord de son ourlet. Des filaments pareils à des larmes de lait Ont pleuré, sous l'autan cruel qui les repousse, À travers de petits caillots de marne rousse, Pour s'en aller où la pente les appelait. |
Rimbaud invenit. |
{ |
Ma bouche s'accoupla souvent à sa ventouse [;] Mon âme, du coït matériel jalouse, En fit son larmier fauve et son nid de sanglots. C'est l'olive pâmée, et la flûte câline ; C'est le tube où descend la céleste praline : Chanaan féminin dans les moiteurs éclos ! |
Paul
Verlaine
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