Arthur Rimbaud, le poète / Accueil > Iconographie > La correspondance


   Dessins issus de la correspondance (Verlaine, Delahaye, Nouveau...)

 



 


 


 



 


 


 



 



 



 

 

 

    
    
Nous possédons des dessins nombreux de Verlaine et Delahaye, quelques-uns aussi de Nouveau. Verlaine et Delahaye, l'ami de Paris et celui de Charleville, étaient tous deux d'habiles dessinateurs. Ils aimaient agrémenter leurs "épistoles" de croquis, pittoresques ou humoristiques, dont certains évoquent Rimbaud. 
     Une lettre de 1872, récemment découverte, et que reproduit Jean-Jacques Lefrère dans son Face à Rimbaud, illustre bien ce sens du pittoresque. Elle est adressée par Verlaine à Edmond Lepelletier. Le dessin, intitulé :
Aspect de Cannon Street à 10 o'clock of morning, représente les deux poètes, alignés devant deux cireurs de bottes londoniens, en train de faire astiquer leurs chaussures.
     En voici un autre exemple, signalé par Michael Pakenham dans sa Correspondance générale de Verlaine (tome I, p.549-550). Dans
une lettre de Delahaye à un ami (Ernest Millot), qui porte la date du 28 janvier 1877, on ne trouve pas moins de cinq dessins racontant les "aventures épastrouillantes" de Rimbaud : Rimbaud à bord du Prince d'Orange ; traversant la jungle de Java ; dans une mairie de Java ; la tempête du retour ; le dernier de ces dessins montre le poète, de retour à Charleville, attablé en compagnie de l'auteur de la lettre  : "Et quand repars-tu ? demande ce dernier dans une bulle. Aussitôt que possible, répond Rimbaud ". Une vraie BD !
     Mais c'est surtout dans les lettres échangées entre eux que Delahaye et Verlaine s'en donnent à cœur joie. Rimbaud parti courir le monde, les deux hommes entretiennent une correspondance fournie. Correspondance d'autant plus précieuse pour Verlaine qu'elle est désormais son unique moyen d'information sur Rimbaud. Celui-ci, en effet, revient de loin en loin à Charleville où il rencontre Delahaye. Au cours des années 1875-1877, cette correspondance est truffée de dessins par lesquels Verlaine et Delahaye évoquent les heurs et malheurs de leur héros envolé. Quand ils ne savent pas, ils imaginent !
     Le ton de cette correspondance est souvent fort ironique, cruel même à l'occasion. Rimbaud y est presque toujours représenté la pipe au bec, une bouteille ou une chope à portée de main, quand il n'est pas vautré, ivre mort, contre une barrique ou sous une table. Il parle comme un charretier, agit de façon excentrique. Il est le "voyageur toqué", le "nouveau Juif errant", le nègre-blanc, "le monstre". Il est l'innommable, on l'appelle "l'Homme", "l'Œstre", "Chose", "Machin", ... jamais ou presque par son nom. Les poèmes parodiques ou faux-Coppées dont Verlaine accompagne parfois ses dessins laissent percer eux aussi une humeur quelque peu caustique. Il y a, certes, une part de nostalgie dans cette omniprésence de Rimbaud dans la correspondance de ses anciens compères, mais la part du ressentiment est non moins perceptible. Et c'est ce qui nous vaut ce portrait assez peu flatteur, fort différent de celui que diffuseront Delahaye et Verlaine dans les années 1880-1890, quand ils se feront les biographes, les éditeurs et les témoins privilégiés du grand poète trop tôt disparu.

     J'ai tenté de dresser ici une liste large de ces dessins et de donner, dans les limites de mes connaissances, des références fiables. Ma principale source d'information a été : Michael Pakenham, Verlaine, Correspondance générale I, 1857-1885, Fayard, 2005. Cet ouvrage reproduit et date tous les dessins contenus dans les lettres échangées entre Ernest Delahaye et Paul Verlaine.
     Les croquis contenus dans cette correspondance étaient presque toujours accompagnés de légendes, que j'utilise comme des titres (dans ce cas, la liste les reproduit entre guillemets). Ces titres sont fort pittoresques, et parfois agrémentés de déformations phonétiques censées représenter l'accent "parisiano-ardennais" (Verlaine dixit) de Rimbaud. Les autres titres sont ceux enregistrés par l'usage, rarement de moi.
     Le lecteur trouvera ci-contre une sélection de miniatures qui respecte la progression chronologique. Cela marche de haut en bas, d'abord à gauche, puis à droite. Des liens partent des miniatures et des titres qui leur correspondent vers une fiche comportant si possible un agrandissement et parfois des éclaircissements nécessaires (circonstances, textes d'accompagnement, commentaires...).
     Je fournis en fin de page une table séparée des Vieux Coppées accompagnés de dessins des années 1875-1877.
 



 

 



 












 



 



 






 


 


 




 

"VIEUX COPPÉES" DE 1875-1877
 

Épris d'absinthe pure et de philomathie (24 août 1875)
La sale bête ! (En général). Et je m'emmerde ! (26 octobre 1875)
C'est pas injuss' d' se voir dans un' pareill' situate ? (24 mars 1876)
O la la, j'ai rien fait du ch'min d'puis mon dergnier (1876?)
Ah merde alors, j'aim' mieux l'Café d'Suèd que la Suède (18 juillet 1877)

 

Pour un 6e "Vieux Coppée" dont on connaît l'existence par Delahaye, on n'a pas retrouvé le manuscrit. J'en donne malgré tout le texte ci-dessous.


Je renonce à Satan, à ses pomp' à ses œuffs ! (été 1878)

Je renonce à Satan, à ses pomp’, à ses œuffs !
Je vous gobe, ô profonds mugissements des bœufs
J’fonde eun’ nouvelle école, et sans coll’, j’agricole.
Coll’-toi ça dans l’fusil, mond’ frivole, et racole
Z-en d’autres. Désormais j’dis merd’ à les Gatti,
À les Russ’, à les Vienne et aux Scaferlati
D’contrebande, et j’vas faire un très chouett’ mariache.
Je m’cramponne à toi, Roche, et j’défends qu’on m’arrache
Eud’toi... Viv’ le lard dans la soupe – et soillions
Sérillieux, – et qu’nout’ sueur alle abreuff’ nos sillions !

 



PRÉLUDE AU GRAND DÉPART


Dans un documentaire de Micheline Paintault intititulé Prélude au grand départ (SCEREN-CNDP, 2006), Yves Peyré, directeur de la Bibliothèque Jacques Doucet, présente dix-neuf caricatures de Rimbaud issues de la correspondance Nouveau - Verlaine - Delahaye conservées par ce musée :  https://youtu.be/_dcVogZBqqA